PARTAGER AVEC CELUI QUI N’A RIEN
La parole de Jean Baptiste depuis le désert toucha le cœur des gens. Son appel à la conversion et à une vie plus fidèle à Dieu suscita chez beaucoup de personnes une question concrète: Que devons-nous faire? C’est la question qui jaillit toujours en nous lorsque nous entendons un appel radical et que nous ne savons pas comment concrétiser notre réponse.
Jean Baptiste ne leur propose ni rites religieux, ni normes, ni préceptes. Il ne s’agit pas à proprement parler de faire des choses ou d’assumer des devoirs mais d’une nouvelle façon d’être, de vivre d’une manière plus humaine, de déployer quelque chose qui se trouve déjà dans notre coeur: le désir d’une vie plus juste, plus digne et fraternelle.
Ce qui est le plus décisif et le plus réaliste c’est d’ouvrir notre cœur à Dieu tout en regardant attentivement les besoins de ceux qui souffrent. Jean Baptiste réussit à leur résumer sa réponse dans une formule géniale par sa simplicité et par sa vérité: «Que celui qui a deux tuniques, partage avec celui qui n’en a pas; et que celui qui à de quoi manger en fasse de même». Voilà qui est simple et clair.
Que pouvons-nous dire face à ces paroles, nous qui habitons dans un monde où plus d’un tiers de l’humanité vit dans la misère en luttant chaque jour pour survivre alors que nous continuons de remplir nos placards avec toute sorte de tuniques et que nous avons des frigos qui débordent d’aliments?
Et nous chrétiens, que pouvons-nous dire face à cet appel si simple et si humain? Ne devons-nous pas commencer par ouvrir les yeux du coeur afin de prendre plus vivement conscience de cette insensibilité et de cet esclavage qui nous maintient soumis à un bien-être qui nous empêche de devenir plus humains?
Pendant que nous sommes préoccupés, et avec raison, par beaucoup d’aspects du temps actuel du christianisme, nous ne nous rendons pas compte que nous sommes «captifs d’une religion bourgeoise». Le christianisme, tel que nous le vivons, ne semble pas être assez fort pour transformer la société du bien-être. Au contraire, c’est celle-ci qui est en train de dénaturer le meilleur de la religion de Jésus, en vidant notre marche à la suite du Christ des valeurs authentiques telles que la solidarité, la défense des pauvres, la compassion et la justice.
C’est pourquoi, il nous faut valoriser et reconnaître davantage l’effort de tant de personnes qui se rebellent contre cette «captivité», en s’engageant dans des gestes concrets de solidarité et en cultivant un style de vie plus simple, austère et humain.
José Antonio Pagola
Traducteur: Carlos Orduna